Le microbiote intestinal joue-t-il un rôle dans le cancer colorectal ?

Dans cet article, vous allez en apprendre un peu plus sur le cancer colorectal, également appelé cancer du côlon, même s’il peut toucher le rectum. Nous vous expliquons tout sur les symptômes, les causes et l’alimentation à adopter pour se protéger le plus possible de cette maladie.

Qu’est-ce que le cancer colorectal ?

Le cancer colorectal, un problème de santé mondial, est une tumeur maligne touchant la muqueuse du côlon (60% des cas) ou du rectum, dernier segment du tube digestif reliant le côlon à l’anus (40% des cas). Dans 60 à 80 % des cas, ces cancers font suite à une tumeur bénigne, également appelée polype. Leur développement se fait généralement sur 10 à 40 ans par une séquence de mutations génétiques.

Le cancer colorectal est généralement un adénocarcinome, une tumeur maligne développée aux dépens d’un épithélium (tissu composé de cellules étroitement juxtaposées) glandulaire. Un adénome, quant à lui, est une tumeur de l’épithélium glandulaire qui est bégnine.

 

Quels en sont les symptômes ?

Les symptômes du cancer colorectal peuvent ressembler à ceux d’autres problèmes de santé, tels que la constipation. Si les signes suivants apparaissent, parlez-en à votre médecin :

 Des troubles du transit intestinal :

    • une constipation d’apparition récente ou qui s’aggrave, ou à l’inverse une diarrhée persistante

    • des nausées et vomissements

    • une sensation d’évacuation incomplète du rectum après être allé à la selle

    • l’impression que le rectum est plein

    • un besoin pressant d’aller à la selle

    • des selles plus étroites que d’habitude

    • des efforts d’expulsion des matières fécales douloureux et inefficaces.

 Du sang dans les selles :

    • présence de sang rouge ou foncé

    • selles anormalement noires.

 Des douleurs abdominales ou rectales.

 Des symptômes généraux, notamment :

    • perte de poids inexpliquée

    • anémie

    • grande fatigue

    • fièvre.

Cancer colorectal et le microbiote intestinal - Nahibu

 

Qui est touché par le cancer colorectal ?

Dans le monde, on comptait 1,8 million de nouveaux cas (environ 10% des nouveaux cas de cancer) et 881 000 décès en 2018. C’est un problème de santé global car il représente la troisième cause de mortalité par cancer dans le monde. Le taux de mortalité de ces cancers diminue dans les pays industrialisés grâce au dépistage précoce.

Dans ces pays, le risque de développer cette maladie au cours de sa vie est d’environ 5%, et celui de développer un adénome, des tumeurs bénignes qui peuvent se développer en cancer est de 20%. Lorsque la maladie est locale et détectée tôt, le taux de guérison est de 70 à 90%.

En France, le cancer colorectal est le troisième cancer le plus fréquent chez l’homme et le deuxième chez la femme. L’âge moyen au diagnostic est de 71 ans chez l’homme et de 75 ans chez la femme. En 2017, le nombre de cas était estimé à 45 000 en France.

 

Quelles en sont les causes ?

Des mutations génétiques sont à l’origine du développement des cancers. Bien que certaines formes aient un facteur génétique dans leur transmission, le mode de vie et le régime alimentaire jouent un rôle prépondérant sur leur développement.

Voici des facteurs modifiables qui favoriseraient le développement du cancer colorectal :

  • Un régime riche en viande rouge et charcuterie
  • Une alimentation pauvre en fibres
  • Une consommation trop importante et/ou trop fréquente d’alcool
  • Le surpoids et l’obésité
  • Le tabagisme
  • La sédentarité.

L’âge est un facteur non modifiable : le risque de développer ce cancer augmente chez tout le monde après 50 ans.

L’hérédité : le risque augmente si un des parents proches (parents, frères et sœurs ou enfants) a déjà eu ce cancer. 

Les personnes souffrant de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI)  sont également plus à risque.

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Le microbiote est-il impliqué dans le développement du cancer colorectal ?

Le côlon est un lieu susceptible de développer des tumeurs et c’est aussi où réside la plus grande partie du microbiote intestinal.

Plusieurs études ont montré que les communautés bactériennes présentes chez les personnes souffrant de cancer du côlon étaient différentes de celles de personnes saines, ce qui peut créer une dysbiose. Les bactéries associées à la muqueuse du côlon ainsi que les bactéries retrouvées dans les selles ont toutes les deux été étudiées dans ces études. De plus, la composition du microbiote chez le patient cancéreux est différent sur la tumeur et à côté de la tumeur (voir notre article pour tout connaître du microbiote intestinal).

Plusieurs études ont identifié des bactéries différentes mais il semblerait qu’il y ait un enrichissement global en espèces de Fusobacterium et de Campylobacter, associées avec la muqueuse tumorale, comparé à des tissus non tumoraux chez les mêmes patients. Un enrichissement en ces espèces a également été observé chez les patients cancéreux comparés à des patients sains.

L’étude des bactéries a permis d’en identifier plusieurs comme potentielles contributrices au développement du cancer colorectal. Streptococcus gallolyticus, dont l’ADN a été retrouvé dans 20-50% des tissus cancéreux, pourrait participer à la croissance tumorale chez certains individus. Mais elle pourrait également être une bactérie opportuniste qui ne contribue pas à son développement mais croît aisément dans l’environnement tumoral. Escherichia coli se retrouve en abondance plus élevée dans des tissus tumoraux et pourrait contribuer à la carcinogenèse du côlon. Fusobacterium nucleatum pourrait également participer à l’initiation de la maladie par sa modulation de l’inflammation.

Toutefois, plus qu’une bactérie individuelle responsable, il paraît plus probable que la communauté bactérienne entière ainsi que les composés qu’elle produit jouent un rôle dans la carcinogenèse (processus de formation du cancer).

Les graisses et les acides biliaires

Les régimes riches en graisses sont associés avec une plus forte incidence de cancer colorectal. Les régimes riches en graisses saturées (provenant principalement des produits animaux) augmentent la production d’acides biliaires. Or, les bactéries du microbiote intestinal participent au métabolisme des acides biliaires et pourraient donc contribuer au lien entre cancer et graisses saturées. En réponse à l’ingestion de graisses saturées, le foie produit des acides biliaires qu’on dit « conjugués ». Ils sont transformés (ou déconjugués) par les bactéries intestinales en acides biliaires secondaires : les acides lithocholique et désoxycholique. Or, ces deux composés sont élevés chez des patients souffrant de cancer du côlon et ils promeuvent l’inflammation.

De plus, la bactérie Bilophila wadsworthia est retrouvée en plus grande quantité chez les mangeurs de produits animaux (viande et produits laitiers). Elle est pro-inflammatoire et peut être détectée par l’analyse du microbiote intestinal Nahibu. Contrôler les taux de cette bactérie pourrait permettre de réduire l’inflammation du côlon qui joue un rôle dans les MICI (Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin) et le cancer.

Toutefois, le métabolisme des acides biliaires par les micro-organismes pourrait également avoir des effets positifs. L’acide ursodésoxycholique semble avoir des effets bénéfiques chez l’Homme et l’animal. Il est même approuvé comme thérapie pour la cirrhose biliaire primaire. Certaines bactéries intestinales, notamment des souches de Clostridium, Ruminococcus, ou Eubacterium peuvent le produire à partir de l’acide chénodésoxycholique.

Les fibres et les acides gras à chaîne courte

Les bactéries intestinales peuvent produire des acides gras à chaîne courte (AGCC),  à partir des fibres végétales que nous ingérons. Ces fibres, non digérées par notre organisme, sont fermentées par notre flore intestinale. Elles sont présentes dans les fruits, légumes, légumineuses et les céréales complètes. Les AGCC produits ont un effet anti-inflammatoire et pourraient donc avoir un effet protecteur contre le cancer.

Les protéines

En revanche, un régime alimentaire riche en protéines peut conduire à la production de composés néfastes par le microbiote, comme les polyamines. Des taux élevés de ces molécules sont retrouvés dans certaines maladies, dont le cancer. Le stress oxydant qui résulte de la dégradation des polyamines serait à l’origine de sa toxicité. De plus, certaines bactéries pathogènes utilisent les polyamines pour augmenter leur virulence. 

Même si l’implication d’un régime riche en protéines sur le cancer du côlon reste sujette à débats, il vaut mieux éviter de consommer trop de protéines animales. En revanche, les fibres alimentaires contenues dans les fruits, légumes et légumineuses peuvent limiter la fermentation des protéines dans le côlon et auraient donc un effet protecteur.

L’alcool

Le produit de la dégradation de l’alcool, l’acétaldéhyde, est carcinogène et hautement toxique. Les bactéries du microbiote buccal auraient la capacité de former ce composé à partir de l’alcool, et il se pourrait que celles du microbiote intestinal aient cette même propriété. Il faut donc réduire sa consommation de boissons alcoolisées pour limiter la formation de ce composé fortement toxique.

Cancer colorectal et le microbiote - Nahibu

Que manger pour se protéger du cancer du côlon ?

Des recommandations peuvent être émises pour diminuer le risque de développer cette maladie. La nutrition joue un rôle protecteur important. Il faut limiter sa consommation de protéines, surtout animales (voir notre Top des alternatives à la viande). En revanche le poisson gras (thon, sardine, saumon, hareng…), grâce aux omega-3 qu’il contient, possèderait des propriétés anti-inflammatoires. Pourquoi ne pas introduire quelques repas végétariens dans vos menus de la semaine et privilégier le poisson à la viande ? Il est également bon de diminuer sa consommation de graisses comme le beurre, la crème, les produits transformés ou les plats en sauce. Privilégiez les bonnes graisses comme l’huile d’olive, l’huile de colza et l’huile de lin.

Il est primordial de limiter sa consommation d’alcool, voire de l’arrêter.

En revanche, la consommation de légumes, fruits, légumineuses et céréales complètes est à favoriser. Les fibres qu’ils contiennent ont un rôle protecteur et contribuent à la diversité du microbiome. Remplacez les farines raffinées par des farines complètes (pain complet, riz complet…). Mangez des légumes variés et de saison ; une assiette équilibrée doit contenir pour moitié de légumes (en savoir plus avec notre article sur l’alimentation saine et équilibrée). N’oubliez pas d’ajouter des herbes aromatiques telles que le thym, l’origan ou le basilic, pour enrichir vos plats en fibres, vitamines et minéraux.

Enfin, il est important de garder un poids sain. L’activité physique joue un rôle bénéfique sur la gestion du poids et exerce également un rôle protecteur contre le cancer. Il est donc nécessaire de l’intégrer à son quotidien : marche, vélo, natation, pilates, danse, musculation, sports collectifs… il existe une multitude de possibilités pour joindre l’utile à l’agréable !

 

Comment diagnostiquer le cancer colorectal ?

Comme mentionné ci-dessus, les patients souffrant de MICI sont plus sujets à développer un cancer du côlon. Ils doivent donc avoir un suivi régulier avec un gastro-entérologue et un dépistage adapté.

Les personnes ayant des parents souffrants ou ayant souffert d’un cancer du côlon doivent suivre un dépistage précoce. Parlez-en à votre médecin car il est primordial de ne pas omettre ces examens : détectée tôt, cette maladie a plus de chance de guérison grâce à un traitement adapté.

Gratuit pour toutes les personnes entre 50 et 74 ans à partir d’un simple prélèvement de selles, le dépistage permet de détecter un cancer débutant. Parlez-en à votre médecin traitant et ne négligez pas ce test qui permet de détecter de manière précoce, de démarrer un traitement rapidement, et donc d’augmenter les chances de survie.

Sources :

Microbes, Microbiota, and Colon Cancer. Cynthia L. Sears and Wendy S. Garrett. Cell Host & Microbe, 12 March 12, 2014.

The gut microbiota, bacterial metabolites and colorectal cancer. Petra Louis, Georgina L. Hold and Harry J. Flint. Nature Reviews Microbiology, 8 September 2014.

Microbiota: a key orchestrator of cancer therapy. Soumen Roy and Giorgio Trinchieri. Nature Reviews Cancer, 17 Mar 2017.

Global trends in colorectal cancer mortality: projections to the year 2035. Marzieh Araghi, Isabelle Soerjomataram, Mark Jenkins, James Brierley, Eva Morris, Freddie Bray and Melina Arnold. International Journal of Cancer: 144, 2992–3000, 2019.

Ameli.fr

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